
Vous êtes un cancérologue réputé, respecté. Vos décennies d’expérience, de publications, de combat perdus et gagnés contre la maladie forment le piédestal sur lequel vous dominez votre environnement professionnel.
Malgré vos tempes argentées, vos rides, vous avez le teint hâlé, l’oeil vif et maintenez une silhouette szelte. Vous êtes en pleine possession de vos moyens ; sain de corps et d’esprit.
Vous êtes une huile, un ponte. Le patron. El jeffe. The boss.
Vous êtes le numéro 1.
Depuis quelques années, vous voyez passer des études in vitro et in vivo portant sur les effets du fenbendazole vétérinaire et son équivalent humain, le mébendazole, sur des cellules cancéreuses. Il y a même quelques essais cliniques en bonne et dûe forme.
Des collègues commencent à chuchoter. On évoque des malades ayant consommé du FBZ ou du MBZ, en dehors de tout traitement conventionel. Et on parle même de rémission radicale. Des preuves existent.
Encore le mois dernier, une équipe chinoise publiait une étude poussée sur l’application du FBZ sur des cellules du type HeLa (cancer de l’utérus). Avec des résultats étonnants.
A ce stade, deux choix se présentent à vous :
CHOIX 1
-Ne rien faire, ignorer. C’est du bruit, ça passera. Combien de fois les gogos se sont excités sur tel ou tel poudre de perlimpinpin ? Et à chaque fois, le cancer -impérial et impératif- reprenait ses droits. Et sa livre de chair. Le crabe est une affaire sérieuse pour des experts sérieux.
CHOIX 2
-Vos neurones s’agitent. Vous sentez l’excitation de vos jeunes années (à la fac, et comme interne sous la coupe des patrons de l’époque). Et c’est bien normal puisqu’il s’agit de l’essence de la démarche scientifique, et vous en êtes un… scientifique. Est-ce un délire collectif ? Une énième charlatanerie ? Comment des molécules anthelminthiques pourraient agir sur des cellules cancéreuses humaines et animales ?
Quels seraient les mécanismes en jeu ? Est-ce la voie métabolique avec la régulation du glucose ? La déstabilisation des microtubules ? L’apoptose ? La pyroptose ? La nécrose ? La ferroptose ? L’activation du gène P53 ? Cela semble extravagant.
Et quid de ces cancéreux qui témoignent et qui même écrivent des bouquins, des blogs, etc. ? Ces cas ne sont pas tous falsifiés. Ou alors effet placebo ? Guérison miraculeuse ? Vous connaissez vos classiques et l’histoire, vous savez pertinemment que cela a toujours existé y compris pour le crabe.
Votre esprit se perd à l’horizon… Votre voix interne remue : « et si… ? »… Et si c’était biologiquement valide ? Votre expérience reprend le dessus : vous connaissez parfaitement les effets secondaires multiples des chimiothérapies et de la radiothérapie sur les patients… Les cycles de chimios, tous les produits… Les dégâts, les coûts engendrés… D’un autre côté, la toxicité du FBZ semble très faible. Alors… « Et si… ? ». Vous retroussez vos manches, vous convoquez votre équipe. Vous êtes prêt à vous jeter dans la mêlée pour y voir clair. Une bonne fois pour toute.
C’est l’heure de la synthèse : « FBZ ou pas… telle est la question » !
C’est à la fois d’une simplicité biblique et d’une richesse toute shakespearienne.
Qu’attend-on ? Où sont les pontes ? Les patrons ? Les huiles ?
La logique et la science devraient créer un énorme feu d’artifices de recherches et de tests dans le monde.
Ce n’est pas -encore- le cas.
La voici la véritable anomalie.
Bien plus qu’une cellule cancéreuse entourée de ses mystères.
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